Eric Orsenna parle d’agriculture

Une belle intervention d’Eric Orsenna sur l’agriculture aux Ernest de l’ENS. Elle fait écho aux déclarations récentes de la FAO qui souligne que si dans le monde près de 1 milliard d’êtres humains souffrent de la faim, plus de la moitié sont des agriculteurs !

A noter que ces vidéos sont également disponibles gratuitement sur l’AppleStore et peuvent être podcastées.

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Si vous ne parvenez pas à voir la vidéo, cliquez ici.

La culture du riz c’est aussi de l’art

Le rice paddy art

Au Japon, dans le village de Inakadate, depuis bientôt 20 ans, une curieuse manie prend les riziculteurs. Ils se mettent chaque année à « peindre » dans leurs rizières des personnages ou des scènes géantes sans utiliser le moindre pinceau ou pot de peinture. Ils ont selectionné des variétés de couleurs différentes (6 au total allant du vert en passant par le jaune jusqu’au pourpre) qu’ils utilisent comme du fil sur un canevas conçu par un programme informatique pour respecter les perspectives. L’article du Times précise l’origine de cette idée née en 1993 pour attirer les touristes. Opération réussie puisque l’année dernière 170 000 touristes se sont pressés vers ce petit village quasiment inconnu il y a vingt ans pour observer les grandes oeuvres végétales depuis des plateformes surelevées dédiées à la contemplation.

Vous pouvez découvrir un petit florilège ici.

Analyse des conditions climatiques extrèmes en Russie

Situation climatique extrême

La vague de chaleur qu’a connu cet été la Russie apparait clairement sur ce graphique publié par le scientifique spécialiste du climat Joe Wheatley. Les mois de juin et de juillet 2010 ressortent de manière très significative du nuage de points des situations climatiques mensuelles. Je trouve cette représentation graphique très parlante. Elle se base sur un calcul d’index climatique standardisé. On retrouve sur l’axe des abscisses l’index des températures et sur l’axe des ordonnées l’index des précipitations. Si l’index est proche de O, cela signifie qu’on est dans une situation mensuelle normale (proche de la médiane), pour un indice de pluie de +1 à +1,5 on est dans une situation modérément humide, de +1,5 à 2 très humide, supérieur à 2 extrèmement humide etc. Cette méhode de calcul d’index est relativement récente, les premiers travaux qui ont permis de mettre au point ce calcul datent du début des années 1990 (T.B. McKee, N.J. Doesken, and J. Kleist, Colorado State University, 1993.) et est très utilisée aux Etas-unis. On trouvera d’ailleurs ici des cartes utilisant cet index avec une vision de la situation mensuelle, bi-mensuelle, trimestrielle, jusqu’à annuelle. Je ne sais pas si cet index est utilisé en France, mais il est facile à comprendre et tient compte d’une situation normale pour un lieu et une période donnée (qui peut varier du mois jusqu’à l’année).

On voit donc que le mois de juin a été la situation la plus extrème en terme de température et de pluie qu’ait connu la Russie depuis 1948 (l’analyse a été faite sur un jeu de données couvrant la période 1948-2010). Juillet un peu moins extrème n’a pas été mal non plus… A ce jour l’impact réel sur la récolte de céréales en Russie n’est pas encore connu. Les experts pensent cependant qu’il y aura une diminution de près de 30% de la récolte par rapport à 2009.  Le cours des céréales n’a pas tardé a prendre la mesure de ces prévisions et s’est enflammé et l’inflation grimpe en Russie.

Sortez les parapluies avec Google Earth

Les images radars existent dans Google Earth depuis 2007

Google Earth avait déjà intégré depuis 2007 des images radars. Il suffit pour cela d’activer l’option météo dans le volet de gauche de l’outil.

Ces images sont en temps réels et se basent sur un réseau de données radar.

La dernière innovation des ingénieurs de Google permet en zoomant sur une zone où il pleut (on peut voir en plus des images radars, la couverture nuageuse) de voir une animation d’une pluie plus ou moins battante sur l’image aérienne ou satellite de la zone (voir image ci-dessous).

tombe la pluie

Est-ce une réelle innovation pratique ou simplement un gadget esthétique mais inutile ? Le débat est ouvert, mais force est de constater que Google poursuit ses travaux de Recherche et Développement sur les aspects climatiques et on ne peut que s’en réjouir. Je suis, quant à moi persuadé que cet outil pourrait devenir une plateforme efficace de diffusion de conseils délivrés aux agriculteurs. Les aspects cartographiques et désormais climatiques incluant des données temps réels sont les piliers du conseil agronomique. Pourquoi ne pas les utiliser davantage pour délivrer des conseils et des outils d’aide à la prise de décision ?

Pour info d’autres sites permettent déjà d’avoir des images radar en temps réel. En dehors de météo France, il y a aussi ce site.

J’attends désormais avec impatience qu’il pleuve pour vérifier, en ouvrant Google Earth, si je vois aussi la pluie tomber sur l’écran de mon ordinateur.

Tous fermier 2.0 !

Farmvile par anshu_s

Du nouveau sur l’application FARMVILLE . Ce jeu très populaire lié à facebook consiste à  labourer des parcelles, planter des cultures et installer des animaux dans une ferme virtuelle. Les joueurs disposent pour cela d’un fond de départ qu’ils doivent faire fructifier (ainsi que leur expérience) en plantant et récoltant des cultures plus ou moins rentables ou en élevant des animaux. Peu de surprises, ni de contraintes liées au climat ou à la conjoncture ici (par rapport à la vraie vie), il semblerait que les prix soient fixes (achat des semences et revente). L’important dans FARMVILLE est d’être très proche de sa « ferme », c’est à dire revenir récolter, vendre ou acheter très régulièrement pour ne pas tout perdre. Les profits sont exprimés en crédits horaires car les temps de production sont extrêmement courts. Il suffit de 72 heures, par exemple, pour un cycle complet de blé, 16h pour l’asperge… Certains fans ont été jusqu’à publier des tableaux de rentabilité par type de production. Je note que le blé est la culture la moins rentable et les vaches qui occupent trop d’espace sont également les moins rentables des animaux… 

 Le jeu existe depuis juin 2009, et il semblerait que ce soit le plus populaire du réseau facebook avec plus de 80 millions d’utilisateurs soit une population agricole très largement supérieure à l’ensemble de la population française! On rappellera que facebook annonce avoir atteint le demi milliard d’utilisateurs ! Le potentiel de croissance est donc énorme, notamment si on inclut tous les autres clones de ce jeu. 

 J’ai testé très rapidement le jeu lors de sa sortie, mais je me suis vite désabonné tant les messages d’alertes que l’application vous envoie sans cesse de votre ferme (ou de celles de vos amis) sont intrusifs et pénibles. Mais il faut reconnaître que l’application est bien faite et elle est extrêmement addictive ! Une enquête récente a d’ailleurs montré qu’aux Etats-Unis, les jeux et les réseaux sociaux ont pris la tête du classement du temps passé sur Internet soit 1/3 du temps passé ! Le panel d’enquêtés et la méthodologie de l’enquête sont discutables mais il est intéressant de noter cette progression au cours du temps. 

 Une des innovations très récentes est que l’application est désormais disponible sur l’iphone. Je viens de l’installer (elle est gratuite) et je dois dire qu’elle est très bien faite et très fluide. Je crois que je vais la tester quelques jours à partir de mon mobile pour vous en dire plus une autre fois. Mais je note déjà que nous venons de passer une nouvelle étape dans le phénomène de l’addiction. En vous suivant jusque dans votre poche (il est possible de recevoir des messages d’alerte sur son portable pour récolter à temps ses aubergines…), le jeu ne vous quitte désormais plus un instant. 

 La poule aux oeufs d’or 

 Un article du Monde, détaille la stratégie commerciale de la société qui distribue le jeu « gratuitement » sur facebook : Zynga. Les biens virtuels sont une source de revenue très importante pour des sociétés pionnières (et non PIONEER) de ce type. Avec la publicité, car désormais certaines semences sont sponsorisées par de vraies compagnies, nous avons une première source de revenue pour l’éditeur. Mais plus innovant et pernicieux, pour les joueurs les plus dépendants, il est possible d’acheter avec de l’argent non virtuel des biens ou des installations virtuelles … Facebook a vu le danger venir et commence à mettre des bâtons dans les roues de ces sociétés non pas pour éviter les dérives mais pour maîtriser de manière hégémonique les flux de monnaies virtuelles. La première plateforme de réseau social vient d’ailleurs récemment de lancer ses tout nouveaux crédits facebook

 En conclusion, cette application, qui au départ peut donner une image bien sympathique de l’agriculture, peut l’être beaucoup moins. Espérons que l’addiction à ce jeu  ne conduisent pas à ruiner l’image de l’agriculture et par la même occasion les économies des joueurs.

Des vacances qui nous bottent

Bienvenue la ferme

D’après un article publié ce jour dans AGRAPRESS, le tourisme à la ferme se porte bien. En France, le tourisme rural représente 36% des recetes globales du tourisme (20 milliards d’euros). La fréquentation en gîte et chambre d’hôtes a progressé malgrès la crise et un recul de la fréquentation des hôtels. Dans le pays, 16 500 exploitations pratiquent une activité touristique. L’agritourisme peut représenter une source de revenu complémentaire non négligeable pour les exploitants et surtout rapprocher citadins et paysans ce qui est une bonne chose.

J’ai découvert à la lecture de l’article le site Bienvenue à la ferme, qui référence près de 6000 exploitations sur tout le territoire. Le site est très bien fait, il est clair et utile. La recherche des fermes peut se faire géographiquement… Et devinez quoi, c’est encore une utilisation de l’API GOOGLE (voir mon précédent billet). On peut aussi rechercher une ferme par type de prestation (gastronomie, service, activités, type d’hébergement,…). Le site est très social, il présente même un compte facebook et la possibilité de poster sur twitter. Bref, un site moderne et au goût du jour qui présente une belle image du monde agricole à ses visiteurs urbains. On le sait Internet est désormais le 1er moyen de réserver ses vacances. Je vais d’ailleurs m’y pencher sérieusement en prévision des miennes !

Le Géoportail s’entrouvre

Le sacrifice d'iphigénie sur l'autel de l'iPhone

Cela fait des années maintenant que l’IGN et la DGME (Direction Générale de la Modernisation de l’État) ont mis en ligne le Géoportail, mais il faut bien reconnaître que le site est à la traîne par rapport à son grand concurrent direct Google. 

Un article lu dans la revue Géomatique Expert du mois de juillet donne des éléments de réponses expliquant ce retard et met le doigt sur ce qui me semble être une erreur grossière des services de l’état concernant la mise à disposition des données géographiques publiques. Le Géoportail porte effectivement très bien son nom, car si on voit bien la richesse du contenu de la plateforme, l’accès y est beaucoup trop restreint. Prière de rester à la porte si vous ne passez pas à la caisse. L’autre erreur à mon avis est d’avoir trop tardé à mettre à disposition des développeurs une API digne de ce nom permettant d’intégrer la visualisation de cartes et l’accès aux données depuis d’autres sites. C’est là, la grosse différence avec Google qui a choisi l’ouverture et la gratuité des accès pour conquérir le monde ! Résultat, la plupart des sites français qui présentent une carte dynamique utilisent l’API de Google.  

La contre-offensive récente de l’IGN est une nouvelle API et le partenariat avec des sociétés éditant des solutions utilisant cette interface de programmation permettant d’avoir accès au fond IGN. Fan de randonnées, j’ai d’ailleurs pu tester ce week-end sur mon iPhone la nouvelle application iPhigéNie qui utilise cette API. Cette application permet d’avoir sur son téléphone toutes les cartes de randonnées au 25 millième avec positionnement GPS et tracés des randonnées (GR, PR, …), elle est très fluide et même en forêt grâce au réseau j’ai pu naviguer sans problème sur les cartes en cache. Bref que du bonheur, mais quoi ? Horreur ! L’application n’est gratuite qu’un mois, il faudra ensuite débourser 13,99€/an pour en profiter et sans même pouvoir disposer des fonctions avancées Autant dire que le randonneur occasionnel que je suis, va désinstaller cette application après un mois d’utilisation.

Apparemment, la notion de service public n’est toujours pas bien intégrée chez nos amis de l’IGN. Leur contenu et la qualité de leurs compétences sont sans aucun doute d’un très haut niveau, mais du fait de leur stratégie commerciale lamentable, leur utilité réelle pour le grand public est très limitée. Il se peut fort bien que le public internaute continuera inexorablement à les ignorer. 

 Iphigénie, un nom décidément encore bien trouvé par les markéteux, va bel et bien une nouvelle fois être sacrifiée !

Les mobiles savent flasher

Optical data recognition de JA_FS

Je viens de tomber sur une publication très intéressante parue dans la revue « Computers and Electronics in Agriculture« , dont le texte complet m’a gentiment été transmis par son auteur portugais Raul Morais dos Santos. Il s’agit d’une synthèse de travaux expérimentant l’utilisation de téléphones mobiles permettant la récupération et la transmission d’information en direct du champ à partir de « tags » préalablement installés sur des parcelles de vigne. Les tags sont des étiquettes qui peuvent être des simples codes barre en 1 dimension (les EAN 13 que vous retrouvez classiquement sur tous les emballages de produits manufacturés), ou de codes en 2D (flash code ou QR Code), ou encore des puces RFID voire des coordonnées GPS.

Le mobile va « flasher » le code qui est en fait une étiquette placée sur une parcelle, c’est à dire qu’il va prendre une photo puis décoder l’étiquette et transmettre via Internet les informations contenues dans le code sur un serveur qui va à son tour renvoyer toute une série d’informations sur le téléphone. Les informations renvoyées peuvent concerner la vie de la parcelle (date de plantation, opérations culturales, rappel des dernières observations,…) ou des informations annexes et utiles au viticulteur (données météo de la station la plus proche, …). L’utilisateur peut aussi transmettre des observations directement depuis son téléphone, qui seront stockées sur le serveur et disponibles plus tard.

La différence entre un code à 1 dimension et un code 2D est que le code 2D va pouvoir stocker beaucoup plus d’information. Un flashcode ou un QR Code (deux normes de codes 2D différentes) peuvent stocker toute une série d’informations statiques liées à la parcelle qui peuvent être lues avec un lecteur intégré au mobile sans besoin de se connecter. Le Code 2D peut aussi contenir une URL, c’est à dire l’adresse d’une page Web à ouvrir, pour recueillir des informations complémentaires hébergées sur un serveur. Les codes 2D tendent à se développer, on commence à en trouver sur certains emballages. Celà permet notamment d’y stocker beaucoup d’informations relatives à la traçabilité des produits. Je suis d’ailleur en train de tester une application disponible sur iPhone développée par la société QuikMark qui a développé depuis peu un système de traçabilité agro-alimentaire à Taiwan, basé sur cette technologie. D’après le site chacun peut, grâce à cette application,  générer soi même des codes barres. C’est effectivement vrai puisque j’ai très simplement pu générer le code 2D permettant d’accéder à ce blog. Vous pouvez le tester en utilisant un lecteur de flashcode. Avec QuikMark pour iphone cela fonctionne très bien.

le code 2D de http://www.ageekculture.com

Dans le cadre de l’étude dont je vous parlais au début de cet article, l’originalité est d’avoir couplé ce système de géoréférencement à l’utilisation d’outils d’aide à la décision permettant aux agriculteurs de disposer d’informations pertinentes leur permettant d’adapter leur conduite de culture et de tracer leurs observations. J’imagine là une voie nouvelle permettant de diffuser des outils facile à prendre en main par les agriculteurs et n’impliquant pas pour eux un investissement matériel (l’usage des mobiles est plus que généralisé, reste à développer les réseaux de type 3G dans les campagnes).

A noter que la viticulture semble bien avancer sur cette technologie, puisqu’en regardant rapidement sur Internet j’ai trouvé une entreprise française qui propose déjà aux viticulteurs d’intégrer un flashcode sur leurs bouteilles pour permettre aux consommateurs de trouver des informations complémentaires à l’étiquetage traditionnel.

Profils paysans

La trilogie Profils Paysans

Je viens de finir la trilogie Profils paysans de Raymond Depardon et ce documentaire au long cours m’a marqué. Il permet de voir des visages de l’agriculture cévenole à travers le regard d’un grand photographe et cinéaste mais aussi un fils d’agriculteur.

Raymond Depardon connait bien son sujet et les personnalités qu’il nous dévoile, il les fréquente pour certaines depuis plus de vingt ans. Le documentaire s’étale d’ailleurs sur plus de dix ans. On suit les jeunes qui s’installent et les difficultées qu’ils rencontrent pour reprendre une ferme. Les vieux, qui ne décrochent de leur métier ou plutôt de leur « passion » qu’à la mort bien longtemps après l’âge de la retraite, sont plus touchant encore. Certains disparaissent en route, d’autres résistent mais leurs forces se réduisent et la mort plane toujours au dessus de ce film.

Un des profil paysan de Depardon

Dans ces contrées reculées de moyenne montagne, c’est l’élevage qui domine et les fermes que Depardon a choisi n’ont pas d’âge. Il y a beaucoup de séquences en intérieur. La cuisine, est presque toujours  le lieu de tournage. On ne laisse pas la caméra aller plus loin et c’est déjà beaucoup. « L’approche » le premier volet de la trilogie en est la preuve tangible, ces paysans là ne se laisse pas facilement amadouer par le cinéaste-photographe. Dans « le quotidien« , l’atmosphère se détend et les langues se délient. Le dernier film « Les temps modernes » est l’épilogue, la fin d’une époque et le début d’une nouvelle ère. Non, semble nous dire le cinéaste et ses paysans, cette paysannerie n’existera plus. Plus personne ne veux reprendre après les anciens. Les fils et les filles s’en vont. Ils ont du remord, comme Depardon en a, mais cette vie est trop dure.