Les Makers vont-ils révolutionner le monde?

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Je viens de terminer le dernier livre de Chris Anderson, une des personnalités américaines les plus écoutées sur les nouvelles technologies : Makers : la nouvelle révolution industrielle.

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Ce livre est déjà un peu ancien puisqu’il date de 2012, mais sa lecture me semble toujours passionnante. Chris Anderson a été durant 12 ans le rédacteur en chef de la revue Wired, une référence sur les nouvelles techno. A la suite de l’édition de son livre, il a quitté son poste pour diriger son entreprise qui fabrique des drônes : 3D Robotics et dont il parle abondamment dans son livre.

Comme beaucoup d’auteurs américains, il excelle dans le story-telling et tout en nous disant des choses passionnantes sur le mouvement Makers, il nous raconte sa propre histoire. Le livre commence avec l’histoire de son grand-père, un inventeur de « garage » qui met au point et dépose un brevet sur un système d’arrosage automatique. Chris Anderson, fait un parallèle entre l’histoire de son grand-père, avec ses difficultés pour trouver un industriel qui disposera des fonds et de l’outil de production suffisant pour exploiter commercialement son invention, et celle des makers d’aujourd’hui.

Le propos de Chris Anderson est de nous démontrer que nous vivons actuellement l’émergence d’une nouvelle révolution qui va bouleverser notre façon de produire des choses. Au même titre que l’informatique personnelle, qui s’est développée à large échelle avec Apple et le PC au début des années 1980 puis d’internet dans les 90, les années 2010 verront émerger un nouvel outil de « bureau » : l’impression 3D et autres outils de conception numérique, largement démocratisés. Ces outils de production associés aux logiciel de Conception Assistée par Ordinateur (CAO), simples d’utilisation et extrêmement performants, permettent à Monsieur et Madame ToutleMonde de concevoir des objets uniques pouvant être commercialisés grâce au web sur un marché mondial. Le partage et l’open-source (ainsi que les scanners 3D), permettent d’acquérir et de partager des plans de conception d’objets créés par d’autres, de les améliorer à l’infini  et de les fabriquer dans une démarche Do It Yoursef (DIY).

Le livre propose quelques récits tout à fait passionnants de self-made men qui ont fait fortune en valorisant leur talent de concepteur grâce aux outils numériques. Chris Anderson mêle à ces récits des esquisses de réflexion sur le bouleversement que pourrait avoir (selon lui) ces technologies sur l’économie industrielle. Il y voit notamment une voie qui permettrait aux pays occidentaux de reprendre la main sur leurs industries, perdues au profit de la Chine. La transformation des bits en atomes, devrait entraîner une longue traîne des choses. Dit autrement, les outils de conception numérique qui deviennent extrêmement puissants et simples d’utilisation permettent de fabriquer des objets physiques et de relancer une économie de la production en développant de nouveaux modèles : les petites séries extrêmement spécialisées et personnalisées par rapport à des production extrêmement massives mais standard.

lddcreationL’exemple de Lego Digital Designer illustre parfaitement le phénomène. Les clients veulent de plus en plus des objets uniques, voire même des objets dont ils rêvent et qu’ils conçoivent eux-mêmes. L’entreprise Lego surfe sur cette vague en proposant à ses clients via ce site de concevoir des modèles uniques conçus à partir d’un logiciel de CAO en ligne, puis de vous expédier la boite avec les briques qui vous permettra de monter votre jouet.

Au-delà des jouets, y-a-t’il une place pour ces technologies ? Chris Anderson semble convaincu en nous détaillant quelques belles réussites commerciales. Le développement des lecteurs de carte de paiement de la société Square en est un excellent exemple. Cette entreprise qui développe des lecteurs de cartes pour smartphone a été créé par deux makers McKelvey et Jack Dorsey. Ce dernier a accessoirement aussi créé twitter…

 

MakerBot-thing-o-matic-300Ce qui me semble passionnant d’un point de vue strictement technique, c’est l’innovation que constitue l’impression 3D. C’est une machine qui permet de  créer des objets à partir de modèles numérisés en 3 dimensions par dépôt additif de matière. Elle peut être personnelle, et donc encore limitée notamment au niveau des formats des objets conçus ou au niveau des matériaux, comme la makerBot. Ou elle peut être dans les nuages comme les services en ligne ShapewayPonoko ou encore Thingiverse. Ces dernières solutions offrent une grande variété de matériaux pouvant aller jusqu’au métal. Ce sont aussi des places de marché (marketplaces) permettant de vendre vos créations à une large communauté de clients potentiels. Etre en possession de votre propre outil de production n’est donc plus une limite, vous pouvez le louer…

Un autre levier important de l’économie et de l’innovation émerge de cette révolution, ce sont les plateformes de financement participatif. Le plus connu est sans doute kickstarter. Initialement créé pour aider les artistes à trouver des fonds pour financer leurs production, ce type de plateforme intègre depuis longtemps beaucoup de projets de création d’entreprises qui souhaitent développer un produit, le plus souvent conçu à la manière DIY.

Enfin, que serait la communauté Makers sans les Fab-Labs (Fabrication Laboratory), ces ateliers de création communautaires, équipés des principaux outils de conception numérique (Imprimante 3D, Découpes Laser, Fraiseuses numériques,…) ouverts à tous.

Et l’agriculture dans tout ça ? Pas facile de trouver grand chose, même si des fab-labs commencent à apparaître dans les campagnes, comme celui de Biarne qui a fait l’objet d’un reportage en 2014. Mais ça Chris Anderson n’en parle pas… En revanche, il termine son livre avec les perspectives qu’offrent ces technologies de conception appliquées au vivant (biotechnologies, industrie alimentaire…).

 

 

 

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La geek culture des agri-drones

L'arducopter, un drone open source

On en entend surtout parler à propos des applications militaires américaines, mais sachez que les drones intéressent un nombre croissant de projets de recherche voire ont déjà des applications concrètes en agriculture.

Un article récent du Monde, résume cette passion naissante liée à la médiatisation des affaires militaires. L’armée américaine qui utilise ces engins pour l’observation et plus récemment pour la destruction de « cibles » en afghanistan ou dans d’autres pays a sans doute fait progresser la technologie et l’a « popularisée » à tel point qu’une communauté grandissante de geeks se lance dans la construction d’appareils suréquipés, ultra légers, autonomes ou pilotés (en anglais on parle d’UAV).

En recherchant dans google vous trouverez une multitudes de sites détaillant comment acheter un drône prêt à être utilisé ou si vous êtes bricoleur comment dénicher les pièces détachées pour construire vous même le votre pour moins de 300 €.

Un des sites marchands les plus connus est DIYdrones, qui permet de trouver tout ce qu’il vous faut pour fabriquer le votre (Do It Yourself). Un autre projet très intéressant est l’arducopter, un projet open-source qui s’appuie sur la technologie arduino. L’intérêt d’une telle démarche est de mettre à disposition des internautes librement l’ensemble des plans de construction d’un drône de qualité et sa plateforme logicielle. La technologie arduino consiste en une plateforme open-source d’électronique programmée qui est basée sur une simple carte à microcontrôleur, et un logiciel, véritable environnement de développement intégré, pour écrire, compiler et transférer le programme vers la carte à microcontrôleur. Bref, celà s’adresse plutôt à des passionnés d’informatique et d’électronique qui ont pas mal d’heures à tuer le soir dans leur garage… Un des principaux intérêts d’une telle démarche est son faible coût et la dynamique de la communauté qui enrichit régulièrement le fond de connaissance et fait progresser la technologie.

Des opérationsplus grand public existent également et rencontrent un certain succès. Les drones de chez Parrot, se pilotent simplement avec un iphone ou un téléphone sous androïd utilisé comme une télécommande « sensorielle » assez bluffante en terme de facilité de prise en main et de stabilité. Une des innovations ici est que le smartphone permet de voir en temps réel ce que filme la caméra embarquée sur le drone. Combinée avec un logiciel, on peut créer des jeux, en apportant de la réalité augmentée (des cibles factices à détruire apparaissent sur l’écran). Toujours une utilisation guerrière, malheureusement mais le côté « ludique » fait que pour beaucoup cela reste une bonne idée de cadeau sous le sapin pour cette année …

Et l’agriculture dans tout ça ? En recherchant sur le net, on trouve des applications tout à fait concrètes qui peuvent déjà prendre la forme de prestations de services. Des sociétés françaises se spécialisent dans le domaine. Par exemple, cette année le vignoble bordelais a vu passer au dessus de sa tête quelques appareils ultra légers équipés de capteurs permettant d’observer la situation sanitaire des vignes. Le vol en stationnaire et à très faible hauteur permet d’acquérir des images de très haute résolution et géoréférencées. Certains projets utilisent en effet le GPS pour rendre ces appareils autonomes en pré-programmant leur parcours de vol à l’échelle d’une exploitation agricole ou du paysage. Des drones équipés de six rotors peuvent embarquer jusqu’à 2 kilos d’équipement et les dernières batteries lithium ion autorisent des vols pouvant durer jusqu’à 40 minutes. L’observation des forêts en Oregon utilisent de tels appareil pour observer l’état des arbres.

La technologie est en train d’exploser et de se démocratiser grâce à une chute des prix et l’émergence de projets open source. Des milliers d’applications sont possibles. Un vaste domaine s’ouvre à nous.